samedi 2 décembre 2023

Au coeur de la nuit

    Le manque de sommeil m'empêche de dormir. Les gens qui me précèdent sur le sentier de l'insomnie connaissent bien le contexte : le corps semble être à bout de bio-énergie, à la limite de la courbature, de la tétanie, le sommeil se refuse.

   L'épuisement de l'instant fait que les pensées partent dans tous les sens, sans aucune coordination. Quelques exemples ?...

   Les superstitions, quelles que soient leurs origines, parlent de démons, de goules, de vampires, de fantômes, d'esprits malveillants qui peuplent les tréfonds de la nuit obscure, en chasse d'humains isolés, de proies faciles. Ca fait des décennies que je travaille seul au plus profond de la nuit ; je n'ai jamais vu de créatures malfaisantes rôder ni au plus près, ni au plus loin. Par dérision, je pourrais dire que les seuls monstres fantasmagoriques que j'ai croisé jusqu'ici ne furent que de piètres humains aux capacités bien plus maléfiques que les pires contes d'antan...

   J'observe à cet instant même où je tape les touches du clavier de mon ordinateur portable, le silence de mon appartement. Mon frigidaire qui s'entête à rester pratiquement vide d'aliments, mes placards qui le miment, la table sur laquelle où je suis accoudé qui cumule des tas de papiers plus ou moins importants, des médicaments, de feuilles volantes griffonnées, la petite vaisselle qui  traine dans le lavabo de l'évier, mon lit défait ou les revues à même le sol recouvertes de poussière... Ce relâchement n'est pas impulsif, il est plutôt maladif.

   Je n'arrive toujours pas à définir le but de mon existence. Soixante ans que je tourne en rond en me demandant ce que je fous sur cette planète et sous cette forme humaine... Je repense à un dialogue d'une série que je nommerai pas ici : "... nous naissons et nous mourrons dans la solitude et entre les deux nous faisons de notre mieux..." Ne serait-ce pas là le seul but véridique que nous nous refusons d'assimiler ?...

   Je vais essayer de reposer cette enveloppe charnelle qui me pèse sur le coeur de la nuit.


1 commentaire:


  1. Comme souvent ton texte est fort et interpellant.

    Au tréfonds de la nuit obscure, nous fabriquons la malfaisance et les monstres fantasmagoriques que tu évoques. Je les connais, ils sont venus chez moi, il a fallu les chasser à grands coups de pieds au c... Parfois je me demande comment nous les (re)produisons. Ils doivent remonter à la nuit des temps générationnels, notre cerveau reptilien comme disent certains. Et sans compter les humains côtoyés . Ils nous ont fait du mal volontairement ou non. Il est des traces indélébiles.

    Il y a toutes sortes de manières d'aborder la question du but de son existence. Il y a tous ceux qui en ont parlé à leur façon, les penseurs, idéologues, gourous labellisés, chefs religieux, et autres professeurs Nimbus qui savent tout sur tout mais souvent sur rien. Et puis il y a chacun de nous qui peut découvrir un jour au fond de lui « ce pourquoi il se sent fait ». Quelque chose d'assez viscéral… et pour certains c'était déjà présent il y a bien longtemps et toujours en attente de jaillir, de se libérer des liens qui entravent. En fait, notre propre vie nous attend sans cesse et nous tardons en chemin.

    Je ne crois pas que nous naissions dans la solitude. Au contraire, nous naissons d'une histoire collective, et sans « les autres » nous serions déjà morts depuis longtemps. Et même nous ne serions encore que dans le néant. Mais nous pouvons vivre un sentiment de solitude chez les hommes. Autrement dit je ne signe pas le dialogue que tu cites. Je crois plutôt que nous naissons d'un projet, d'une volonté à laquelle il nous appartient de coopérer pour que s'accomplisse un destin que l'on se choisit. Manière de conquérir sa liberté.
    C'est là peut-être la difficulté : savoir choisir son destin et le vivre. Chacun fera comme il peut. Et je sais très bien qu'il y a de terribles inégalités en la matière.

    Et pour mettre une pointe d'humour dans tout cela je citerai le philosophe Coluche ! :
    « Dieu a dit : il y aura des hommes blancs, il y aura des hommes noirs, il y aura des hommes grands, il y aura des hommes petits, il y aura des hommes beaux et il y aura des hommes moches, et tous seront égaux ; mais ça sera pas facile… Et puis il a ajouté : il y en aura même qui seront noirs, petits et moches et pour eux, ce sera très dur ! »

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