vendredi 19 avril 2024

Les histoires de monstres ne sont pas des contes

 

   Les monstres existent, j’en ai croisé dans mon enfance. 

   Au départ, c’étaient des formes humanoïdes qui s’amusaient à passer devant les cadres de porte, formes sombres rapides et silencieuses. Elles me faisaient hurler de terreur et flanquaient la trouille à celle qui avait la charge de m’éduquer… Parfois, elles éteignaient la lumière lorsque je descendais le soir au garage pour aller aux toilettes : à chaque fois elles le faisaient quand j’étais au milieu de l’escalier, en panique. Souvent je les sentais rôder à proximité de mon lit la nuit, parfois même sous mon lit… Mon angoisse me poussait à vérifier qu’il n’y avait aucune ouverture de l’intérieur de ma couche, je tirais le traversin pour fermer l’accès à ma frêle enveloppe d’enfant.

   On m’a ensuite raconté une histoire où une mère abandonne son bébé dans ses excréments et ne le nourrit pas ; une histoire où elle jette son autre bébé qu’elle vient d’accoucher dans une poubelle, vivant… Une histoire où l’aîné de cinq ans fait l’école buissonnière pour chaparder de quoi se nourrir et maintenir son petit frère en vie, ce petit bébé qui vit dans sa merde…

   L’histoire finit où le royaume envoie ses sbires jeter les enfants dans les oubliettes, les soumettant à l’inquisition, aux viols et aux coups, sous l’égide de la justice des hommes bons. Un conte pour enfants en somme, où la princesse esseulée aspire à l’arrivée du prince charmant, et où le royaume n'a cure des bâtards…

   Après ça, « Blanche neige », « La belle au bois dormant » et tutti quanti furent irrecevables, même pour un enfant sans intelligence.

   Les monstres existent.  J’ai appris qu’ils se tapissent sous bien des formes : hommes, femmes enfants, vieillards, toutes classes sociales confondues… Ces monstres existent en chacun de nous, attendant patiemment leur heure… 

   Alors en attendant, nous jouons aux beaux et braves humains.


3 commentaires:

  1. Oui oui, les monstres existent. J'ai vu Madona avec les tresses de Baphomet. kéa

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  2. Comme beaucoup, j'ai quelques monstres tapis en moi et même si je fais de mon mieux, je ne réussis pas toujours à les canaliser.
    Mais ceci n'a rien à voir avec ce que le petit garçon que vous étiez a vécu.
    Mme Chapeau.

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  3. Ça ne manque pas les histoires horribles qu'on nous a racontées.
    Si on plus on ajoute celles de notre propre histoire (et en ce qui te concerne ça n'a pas manqué…). Le constat peut-être amer
    Heureusement il existe des dévoreurs de monstres. Parfois ceux qui savent dévorer la vie positivement en font quelques festins définitifs.

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Le pourfendeur de monstres

     Dans tout conte pour enfant on a les éternels protagonistes du « bon » et du « méchant ». Il importe peu de les présenter dans un ordre...